Agir

Le traitement

Cette étape comprend :

  1. La définition des objectifs à atteindre
  2. La mise en place des outils de suivi qui vont mesurer les paramètres essentiels avant, pendant et après l’intervention
  3. Le traitement orienté sur les objectifs énoncés et les actions concrètes pour les atteindre

1. La définition des objectifs à atteindre 

C’est de définir d’une manière précise chaque objectif d’amélioration avec son protocole d’action.

Pour bien faire, la définition des objectifs doit respecter d’une manière simultanée 5 critères, sous forme d’un protocole.

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SMART est un acronyme issu du nom des 5 critères : Spécifique, Mesurable, Acceptable, Réaliste, Temporellement limité.

Spécifique : l’objectif doit être spécifique dans le sens qu’il concerne d’une manière spécifique une action, un sujet, un projet, une personne, une équipe.

Mesurable : dans le sens qu’on ne peut améliorer que ce que l’on mesure. Mesurer peut être motivant surtout lorsque les efforts sont suivis de résultats…

Acceptable ou accepté par l’équipe d’intervention : le patient, ses proches et par le médecin

Réaliste : l’objectif doit être réaliste, atteignable ;

Temporellement limité : il faut se fixer une limite dans le temps.

Les objectifs sans la description du protocole de réalisation ne peuvent pas être SMART et risquent de rester imprécis, non mesurables, irréalistes et de faire perdurer la situation d’inconfort du patient.

Prenons l’exemple d’un objectif mal défini : l’amélioration de l’état du patient en souffrance par la psychothérapie.

 L’amélioration de l’état du patient est un objectif global, général et pas spécifique. Si des outils de mesure ne sont pas définis, l’objectif n’est donc pas mesurable. Comme il n’est pas mesurable, les actions à mettre en place ne sont pas précises. L’objectif n’est pas réaliste s’il n’est pas clairement expliqué, et donc pas limité dans le temps.

      Beaucoup trop de psychothérapeutes travaillent sans se baser sur des objectifs SMART. Les psychothérapies perdurent, sans limite dans le temps, et de plus, sans mesure de leur efficacité.

 Prenons maintenant l’exemple d’un objectif SMART, car un protocole lui est associé.

OBJECTIF : l’amélioration de la stabilité de l’humeur par l’amélioration du sommeil, par la psychothérapie éducative (selon la description du protocole ci-dessous)

Protocole de l’objectif thérapeutique :

      L’objectif Spécifique : amélioration de la quantité, de la qualité et de la régularité du cycle du sommeil. Le médecin fournit au patient un outil de suivi (sous forme de tableau), explique au patient la manière de le remplir, quotidiennement : heure du coucher, heure du réveil, durée des siestes, qualité du sommeil. Le médecin explique aussi lors de chaque consultation pourquoi le sommeil est très important et lors de chaque consultation le médecin, le patient et les proches, analysent ensemble les données enregistrées.

     L’objectif Mesurable : on mesure chaque jour le nombre d’heures de sommeil, la qualité de sommeil et les paramètres associés au cycle de sommeil.

     L’objectif Acceptable : le médecin propose et explique au patient l’importance du sommeil dans la stabilité de l’humeur pour la santé, et s’il accepte l’objectif, il s’engage. Les proches peuvent aussi participer au suivi (avec l’accord du patient).

      L’objectif Réaliste : remplir une colonne dans un tableau chaque jour (ce qui prend uniquement 1-2 minutes) est une tache réaliste et largement atteignable. Il faut cependant vérifier que le patient accomplit bien cette tâche.

    L’objectif Temporellement limité : enregistrer les paramètres de sommeil doit se faire jusqu’à la prochaine consultation, voire pendant 1 mois, ou plus, selon la base définie initialement en commun.

Le protocole doit contenir une liste « check-up » identifiant les tâches à accomplir :

  • Qui fait quoi ?
  • Quels sont les outils utilisés ?
  • Quels paramètres mesurer ?
  • La notification de l’engagement verbal ou sous signature du patient et de son entourage
  • Quels médicaments doivent être pris ? À quelle heure ? Comment ?
  • Le journal d’intervention qui doit tracer l’évolution des interventions et des résultats.

      Un inventaire des problèmes constatés doit être réalisé dans les 5 domaines (biologique, psychoaffectif, cognitif, comportemental et psychosocial) et décider quelles seront les difficultés à traiter, selon un ordre de priorité.

2. Le panneau de bord (les outils de suivi de l’évolution)

Le suivi lie l’action aux résultats. Le suivi utilise un ou plusieurs outils afin de mesurer les paramètres essentiels : au point de départ, pendant l’intervention thérapeutique et après.

L’enregistrement de ces paramètres permet d’apprécier l’évolution de l’état de santé du patient, les résultats obtenus et surtout si la direction thérapeutique engagée est bonne.

Il est réalisé à l’aide d’un ou plusieurs outils. Les paramètres enregistrés sont le sommeil, l’humeur, la fatigue, l’anxiété, l’irritabilité, la consommation de produits toxiques, la libido, le cycle menstruel, les médicaments, etc.

Deux grands types d’outils de suivi existent et doivent être utilisés :

  1. La fiche journalière qui enregistre des paramètres comme le sommeil, l’humeur, la fatigue, l’anxiété, l’irritabilité, la consommation des produits toxiques, la libido, le cycle menstruel, les médicaments, etc. (cliquez ici pour télécharger un exemple de fiche journalière)
  2. L’échelle thymique qui enregistre une série de paramètres, en accordant un score à chaque dimension. (cliquez ici pour télécharger un exemple de fiche thymique… à venir)

      Les scores ainsi obtenus par addition fournissent une note de l’humeur à un certain moment. Cette note n’a pas beaucoup d’importance. C’est sa variation dans le temps qui nous importe, car elle  nous indique la dynamique positive ou négative de l’évolution de l’humeur. Par exemple, un patient qui mesure son humeur à l’aide de cette échelle obtient une note de – 34 (dépression). Âpres un traitement de 2 semaines, le patient obtient une note de -20, cela veut dire que son humeur est devenue moins dépressive et que l’évolution est favorable.Cette évolution nous indique que l’intervention thérapeutique suit la bonne direction et qu’il faut maintenir le cap pour continuer dans le sens de l’amélioration de l’humeur.

3. Le traitement : les problèmes et leurs solutions

La nature des solutions doit respecter la nature des problèmes constatés. J’appelle cela « le principe de la concordance résolutive ». Le nom parait un peu compliqué, mais le sens est simple : traiter un problème d’une certaine nature avec une réponse de la même nature. Une pneumonie ne sera pas traitée avec la psychothérapie, mais plutôt avec un antibiotique, aussi comme une dépression ne sera pas traitée avec des antibiotiques, mais plutôt et probablement avec la psychothérapie. 

      Ce principe nous recommande d’identifier la nature du problème pour chercher par la suite les solutions dans le même registre.

      Dans la section «  les causes du trouble de l’humeur », j’insistais sur la nature de ces causes, qui sont de deux natures :

  • Biologique
  • Psychologique

Un problème provoqué par une cause de nature biologique doit être traité par une solution de nature biologique (traitement médicamenteux),  tout comme un problème provoqué par une cause de nature psychologique doit être traité par une solution de nature psychologique (psychothérapie). Cela répond bien à la question qui se pose souvent : comment traiter la dépression ?

      Si la dépression a été provoquée par une cause de nature psychologique (un événement négatif comme un deuil, une séparation, un licenciement etc.) la solution sera la psychothérapie et non la prise de médicament. L’usage d’antidépresseurs dans ce type de dépression d’origine psychologique invite à la réflexion !

      Si la dépression a été provoquée par une cause de nature biologique (le trouble bipolaire, la prise de substances toxiques, la prise de certains médicaments, la survenue de différentes maladies, etc.) la solution sera l’administration de médicaments et non la psychothérapie. L’usage seule de la psychothérapie dans ce type de dépression ne sera ni efficace, ni recommandée !

      Maintenant regardons de plus près les problèmes et leurs solutions, en fonction de leur nature. J’ai organisé la nature des problèmes en 5 groupes.  Cela simplifie le regard et l’analyse portés sur les problèmes de l’humeur, et également sur les possibles solutions.

A. Problèmes de nature biologique 

      En toute logique, les solutions des problèmes d’origine biologique nécessitent des solutions visant à réparer les déséquilibres du fonctionnement biologique. Tout ce qui touche à la biologie et au fonctionnement biologique peut être source de problèmes. Par exemple, boire du café le soir peut perturber le sommeil, sans un bon sommeil, le fonctionnement de l’organisme est affecté. Certains médicaments, les substances toxiques, l’alcool, etc. risquent de perturber le fonctionnement biologique et affecter l’humeur.

      Trois solutions biologiques sont possibles :

  • L’élimination de tous les déstabilisateurs biologiques (les toxiques, les médicaments déstabilisateurs de l’humeur)
  • Inciter tous les comportements favorables aux équilibres biologiques
  • La prise des médicaments qui peuvent stabiliser l’humeur

      Les solutions d’ordre biologique sont responsables de l’amélioration significative (80 %) de l’humeur, donc leur importance reste cardinale.

      Trois solutions biologiques rapides et efficaces, responsables de 70 %  d’une amélioration favorable :

    1. Éliminer par une diminution progressive tous les produits toxiques (les drogues, le cannabis, etc.) ou les médicaments qui déstabilisent l’humeur
    2. Sommeil en quantité suffisante de 7-8 h/jour, avec régularité de l’heure de coucher dans un créneau d’une heure (ex. se coucher tous les jours entre 22 et 23 heures le soir)
    3. La prise d’un régulateur de l’humeur
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B. Problèmes de nature psychoaffective

      Les problèmes de nature psychoaffective sont les situations, les conséquences ou les événements qui font souffrir une personne bipolaire (dispute, séparation, conflit, deuil, problème d’adaptation, etc.). Ces difficultés se surajoutent aux problèmes de l’humeur,  les entretiennent ou les compliquent.

Les solutions aux problèmes de nature psychoaffective passent par divers types de psychothérapies qui doivent souvent accompagner les autres formes d’intervention thérapeutique.

C. Problèmes de nature cognitive

      Les problèmes de nature cognitive sont : les problèmes de mémoire, de concentration, d’attention, d’analyse, de synthèse, de raisonnement, de jugement, etc.). Dans le trouble bipolaire, ces fonctions (cognitives) sont affectées.

   Lorsque les problèmes biologiques diminuent, les problèmes cognitifs diminuent également. En revanche, des gênes cognitives persistent souvent. La solution consiste dans une thérapie cognitive, ou de restructuration cognitive, qui représente une sorte d’entrainement de ces fonctions. Attention à l’usage des benzodiazépines, réputées dans l’affaiblissement persistant de la mémoire, de la concentration et de l’attention.

D. Problèmes de nature comportementale

   Les problèmes de nature comportementale sont : les actes de violence, d’hostilité, bagarres, disputes, agressions, transgression de règles, de lois, etc.

  Le traitement de ces problèmes est donc ainsi de nature comportementale : hygiène de vie, discipline, effort comportemental, expositions, désensibilisation, etc.

E. Problèmes de nature psychosociale

  Les problèmes de nature psychosociale sont : les problèmes liés au fonctionnement social comme la condition sociale, le travail, la famille, le rapport à l’argent, etc. Le traitement de ces problèmes consiste en la prise de mesures administratives, médicales (arrêt de travail), d’accompagnement social, d’orientation et de soutien social, financier… afin d’améliorer la condition sociale du patient.